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25 septembre 2006 1 25 /09 /septembre /2006 08:11

Tendances sécessionnistes

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                              Vous étiez donc coupable

                         De quelques grands péchés

                         Pour que Dieu tout aimable

                         Vous ait tant affligé ?

                         Dites-nous l'occasion

                         De cette punition.

                                            (J. D'Ormesson - Le Juif errant)

 

Dès l'accession du pays à la souveraineté nationale, le 30 juin 1960, les forces centrifuges, sécessionnistes se sont déchaînées pour déchirer la République du Congo.

Devant les problèmes politiques dus à l'impréparation, aux promesses démagogiques, au manque de capacités intellectuelles, au défaut d'expérience, à la carence de valeurs morales des nouveaux dirigeants, à la mutinerie de l'armée garante théorique de la démocratie et du bien-être des populations, des fissures, des crevasses sont très rapidement apparues dans l'unité nationale.

Les responsables qui avaient pris la charge de la jeune République à peine éclose, sortant des fonts baptismaux, se sont trouvés face à des problèmes politiques, sociaux, militaires et bientôt économiques dont personne ne pouvait à l'époque mesurer l'amplitude, prévoir les développements et encore moins concevoir les solutions.

Voulant sauvegarder ses richesses potentielles, certain de l'appui des entrepreneurs locaux et des groupes financiers internationaux, Moïse Tshombe proclame l'indépendance de la province katangaise dès le 11 juillet.

Mécontent de ne pas avoir eu un portefeuille ministériel dans le gouvernement de son ami Patrice Lumumba, Albert Kalondji proclame l'indépendance de la province diamantifère du Sud-Kasaï dès le 8 août.

Révoqué par Joseph Kasavubu, Président de la République, le Premier Ministre Patrice Lumumba, après une tentative de fuite vers son fief de Stanleyville, est emprisonné à la mi-novembre 1960 et la Province orientale fait de facto sécession sous le contrôle d'Antoine Gizenga.

Chacun de ces protagonistes voulait posséder une part du gâteau, avoir le pouvoir sur une partie, la plus grande possible, la plus riche possible de la jeune République.

Les quatre ans qui ont suivi ont vu un déploiement d'actions diplomatiques, une dépense d'énergie, un gaspillage de temps, d'idées, pour remédier à cette situation.

Dès le mois d'août 1961, le Premier Ministre Cyrille Adoula, successeur de Lumumba, se réconcilie avec Gbenye et Gizenga aux détriments de Tshombe et la Province orientale rentre dans le giron de Léopoldville.

En septembre 1962, c'est la fin de la sécession kasaïenne, puis, avec l'aide musclée des forces de l'ONU., en janvier 1963, le Katanga se soumet.

Un groupe de modérés a beaucoup d'influence sur la pensée et l'action du Premier Ministre Adoula, le "groupe de Binza", comprenant Nendaka, Bomboko, Mobutu, Kandolo et Ndele qui constitue la tête pensante, insuffle le dynamisme politique nécessaire à la République du Congo.

Mais l'opposition systématique et négative d'une poignée de députés empêchant toute action gouvernementale, toute décision positive, a amené le Président Kasavubu à dissoudre les Chambres.

Ces irréductibles se sont alors réfugiés à Brazzaville où ils ont été pris en main par l'Ambassade de la Chine populaire.

Ils créent le Conseil National de Libération (C.N.L.) autour de Christophe Gbenye et de Bocheley Davidson, deux militants lumumbistes extrémistes convaincus et très actifs.

En 1963, se développe dans la région de Bandundu, plus spécialement dans les territoires de Ngungu et d'Idiofa, une rébellion menée par un ancien député du Parti Solidaire Africain (P.S.A.) fondé par Antoine Gizenga, le Député Pierre Mulele.

Pierre Mulele est né à Idiofa en 1929 et, élu député en mai 1960, il entre comme ministre dans le gouvernement dirigé par Patrice Lumumba.

Réfugié à Stanleyville fin 1960, il sera représentant au Caire de la dissidence de la Province orientale; il y restera après la réconciliation de 1961.

Il voyage en Chine continentale en 1962 et sera de retour dans le Bandundu en 1963 où il mettra en application tout ce qu'il a appris à Pékin.

La rébellion éclate dans la région du Kwilu le 1er janvier 1964 et bientôt l'on déplore le massacre de trois Européens à Kilembe.

L'état d'exception est proclamé le 18 janvier 1964; l'Armée nationale congolaise intervient et confine la dissidence dans un triangle de 100 kilomètres de côté couvrant partiellement les Territoires de Kikwit, Ngungu et Idiofa.

On parlera beaucoup de Mulele à Léopoldville et son nom aura un rayonnement partout où des émeutes éclatent; il acquerra, malgré son peu d'actions sur le terrain, un charisme certain dans les milieux de la violence politique au Congo.

A la même époque, en 1964, Gaston Soumialot est envoyé de Brazzaville à Usumbura, au Burundi où la République populaire de Chine possède, là aussi, une ambassade pléthorique.

Immédiatement, des problèmes surgissent au Kivu à partir du Territoire de Fizzi-Baraka adossé au lac Tanganyika.

Cela va dès lors très vite.

Persuadé de l'invincibilité des troupes rebelles, rumeur soigneusement entretenue par les militaires en fuite et les populations crédules, les soldats réguliers se débandent, changent de camp, abandonnent matériel, véhicules, armes et munitions.

Les troupes rebelles trouvent aussi un appui considérable, dans un premier temps, auprès des populations civiles lasses des exactions commises par les militaires réguliers indisciplinés, mal payés, peu encadrés et vivant sur le pays qu'ils considèrent comme une terre d'occupation.

Ce fut, de la part des Chinois, une rébellion économique, ils y ont peu, très peu investi; l'important était de déstabiliser le régime, de créer un abcès de fixation au centre de l'Afrique, d'affaiblir l'économie de la région et par réaction celle de l'Occident.

Lorsque le reflux surviendra, lorsque les rebelles, drogués au chanvre, sans formation militaire ou idéologique, des pillards, des violeurs, des massacreurs lâchés dans les villages et les agglomérations subiront les premiers revers, se débanderons, à leur tour, prudemment, lâchement, les Chinois se retireront et laisseront ces prédateurs, grugés, trompés se faire exterminer par les troupes régulières.

Le gouvernement Adoula tombe le 15 mai 1964 en même temps que la ville d'Uvira se rend aux mains des rebelles.

Tshombe est rappelé de Madrid pour former une nouvelle équipe et le recrutement des mercenaires s'accélère; devant la liquéfaction de l'armée régulière ils constituèrent le dernier atout possible de Léopoldville pour éviter que l'entièreté du pays n'échappe au contrôle du gouvernement légal.

En Province orientale, la situation est tendue, le torchon brûle entre le Parlement et le Gouvernement provincial, des armes sont volées par des inconnus dans les arsenaux, la ville de Kindu tombe aux mains de Soumialot le 15 juillet et Stanleyville aux mains du général rebelle Olenga le 7 août 1964.

L'objectif de cette sécession n'était plus d'obtenir une part du gâteau, mais le gâteau tout entier.

Le 3 septembre 1964, ils contrôlent environ le tiers de la surface de la République du Congo mais ont déjà subi un premier échec.

A Bukavu, le 15 août, le Colonel Léonard Mulamba les a empêchés de prendre la ville, le mythe de l'invincibilité devient caduc et cela se sait.

Des commandos de mercenaires, des troupes fraîches débarquent à Boende et à Gemena, encadrent une partie des troupes locales jugées fiables et commencent leur inéluctable progression vers la capitale rebelle.

Dès lors, le reflux sera rapide.

A Stanleyville et dans toute la zone occupée par les insoumis, la situation est dramatique, les infrastructures sont détruites, les champs sont en friche, les populations civiles et encore plus les quelques centaines d'expatriés aux mains des insurgés sont exploités, humiliés, torturés, violés, assassinés ou réduits en quasi-esclavage.

Sous la responsabilité d'une poignée de militaires belges agissant dans le cadre de l'Assistance technique, une colonne mécanisée part de Kamina; son arrivée à Stanleyville sera coordonnée, le 24 novembre 1964, avec le droppage de parachutistes métropolitains.

La ville est investie, plusieurs dizaines d'otages étrangers sont libérés, mais il y a des victimes.

C'est le début de la fin de la dissidence, une terrible rébellion qui a fait énormément de dégâts, qui a généré beaucoup de drames humains.

Ce ne sera pas - hélas ! - la dernière.

Je faisais partie d'une équipe de quelques techniciens expatriés dont la mission était de réoccuper, de réorganiser, les plantations du Groupe Lever immédiatement après leur libération par les troupes régulières.

 

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