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16 mars 2011 3 16 /03 /mars /2011 12:20

Le Mont Nebo - Lieu mythique


    Il est des lieux mythique, chargés d’émotions et de symboles, qui, lorsque vous en êtes imprégnés, lorsque vous sentez toute la charge émotionnelle qui s’en dégage vous mettent dans un état très particulier.
    Je pense avoir déjà écrit dans un de mes textes, que j’ai souvent, en présence d’un de ces lieux l’impression d’avoir vécu le fait historique qu’il représente, tant j’en suis pénétré.
    Aujourd’hui, un couple de mes amis est au Mont Nébo, cet avancée minérale surplomban, depuis la Jordanie, les plaines fertiles et les déserts de l’actuel Etat d’Israël.

Une étape dans l’exode biblique
   
    Ce serait là, suivant la Thora, les récits légendaires, que se serait arrêtée la vie de Moïse, en vue la Terre promise sans qu’il lui soit permis d’y entrer.
    La tradition nous dit qu’il avait conduit son peuple dans le désert durant une longue période, fuyant l’Egypte et son pharaon pour atteindre la terre qui lui aurait été promise par Yahvé en personne (si l‘on peut dire).
    Légende ou réalité ? Qu’importe !
    Que le personnage ait réellement existé, que l’histoire soit vraie ou pas, cela n’a guère d’importance mais le fait est que tout un peuple y croit et que ce peuple, quoiqu’on puisse en dire a influencé notre culture méditerranéenne et bien au delà dans des proportions guères négligeables.
    Ils avaient errés longtemps en suivant le fanion de leur guide, et cette bannière est toujours là, du moins sa représentation, là où il est censé l’avoir définitivement abandonnée.
    Ce n’est pas une croix, celle-ci apparaîtra comme instrument de torture seulement huit à dix siècles plus tard.
    Non, , un long bâton, autour duquel est lové un serpent sensé protéger ceux qui le regarde contre morsures et piqures des prédateurs du désert, scorpions, serpents et autres araignées venimeuses.
    Nous connaissons ce symbole, c’est le caducée repris sur le pare-brise de nos médecins et aux vitrines des pharmaciens de notre quartier, un symbole qui date de plus de trente trois siècles.

   
Lorsque le glaive remplace les chaînes

    Mais ce n‘est pas au caducée que je pense, c’est à la symbolique du lieu.
    Ce peuple en fuite, esclave peut-être de pharaon ou en tous cas fatigué de ne pas avoir son autonomie, décide de prendre les routes du désert en quête d’une  terre qui leur aurait été promise.
    Ils arrivent à la croisée d’un chemin, ou plutôt à une frontière, ils vont quitter la montagne, ils voient à l’horizon les riches plaines, ou, du moins ils l’espèrent,  est sensé couler le lait et le miel.
    Ils doivent aussi abandonner le statut de fugitifs, d’esclaves en fuite, ils deviennent des guerriers, car cette plaine, cette terre, ils devront la conquérir par les armes, par la force, par la terreur peut-être mais certainement pas d’une manière pacifique.
    Tout un peuple qui, en quelques jours change de peau, abandonne son statut de gibier pour devenir chasseur.
    Quelle métamorphose !  Quelle foi en son avenir !

    Leur vieux chef sait qu’il ne peut y entrer , il s’assied, bénit se proches, se couche et rends l’âme, dit la tradition.
    Ce serait donc dans cet amoncellement de rochers qu’il devrait avoir été enterré.

    Son fils adoptif, le vigoureux Joshua prend le commandement, il va s’élancer à la conquête des riches villages, des florissantes agglomérations et des opulentes fermes de ce qui deviendra les deux royaumes hébreux, le Royaume de Juda et le Royaume d’Israël.
    Durant plus de dix siècles, ce peuple occupera le territoire du fond de la Méditerranée.
    Ce ne sera pas un long fleuve tranquille, il verra passer bien des guerriers, aura à livrer bien de combats, subira un exode de plus de quatre-vingt ans.
    Mais il sera aussi témoin du passage des idées, des techniques, il verra défiler toutes les muses et toutes les sciences.   
    Lorsque, en l’an septante de notre ère, il devra quitter cette terre, il devra subir une longue diaspora, il emportera avec lui toutes ces idées, toutes ces techniques et là où il ira, le long de la mare nostrum, en Gaule, en Afrique du Nord, et dans bien d’autres lieux, il ne pourra pas toujours acquérir de la terre, mais continuera à distiller des idées, des techniques, du savoir faire.

La terre autoroute de la connaissance

    Les peuples passent mais la terre reste, cette terre, idéalement située à la charnière de deux hémisphères, celui de l’Est et celui de l’Ouest continuera, jusqu’à notre époque à être le couloir inespéré de l’échange des idées.
    Devant mes amis, actuellement au Mont Nébo, s’étend, vers le Nord la plus grande épaisseur de ce que l’on a appelé le “Croissant fertile”, une allée, une voie royale qui passe entre les déserts, qui s’étend depuis Bassora jusqu’à l’actuelle bande de Gaza.
    Une terre qui offre à celui qui la parcourt asile et nourriture; convoitée depuis des millénaires, mais aussi autoroute des idées.
    C’est par elle que sont passées les idées de Confucius, de Lao Tseu, de Gautama mais aussi celles de Mao Zedong, c’est aussi par elle qu’est passé le “Zéro“ mathématique qui a permis le développement de la technologie; c’est au pas des caravanes des routes de la soie que sont venues les philosophies orientales, de Chine, des Indes et d’ailleurs.
    C’est au sein de ces terres qu’à été écrit la Torah et rédigés les Evangiles, mais aussi qu’à transité le Coran.
    C’est par elles que sont passés les balbutiements des mathématiques et de l’écriture, mais aussi l’épopée de Gilgamesh et le code d’Amourabi
   
    C’est aussi par là, venant de Bactriane, les guerriers de Darius mais aussi les idées de Zoroastre ont envahi la région et nous, venant du Nord de l’Iran,  nous, les
 Ariens avons investi la grande mer centrale.
    Nos civilisations dont nous sommes si fiers, l’hellénique, la romaine ne sont pas issues de générations spontanées, elles ont été alimentées par ces idées qui transitaient à leur portée et qui a permis qu’elles se développent.
   
    Mes amis voyageurs, quand ils regardent vers le Nord doivent avoir l’impression de se trouver devant le cordon ombilical qui les reliaient à leur mère.
    Non pas un filament informe et desséché, mais un cordon toujours vivant, charriant la vie et les connaissances.
    Pourront-ils s’en douter ?
    Combien je regrette de ne pas être à leurs côtés pour leur expliquer.
    De Kars, dans le Nord-Est de la Turquie à Madaba, un passage obligé durant des millénaires, des peuples, des caravanes, des envahisseurs emmenant dans leurs bagages techniques mais aussi idées et civilisations.

Quelques étoiles brillantes dans la profonde nuit noire.

    Mais, me direz-vous, a quoi a donc servi tout ce brassage intellectuel ?
    A asservir les populations, à les laisser dans un marasme économique en proie aux dictateurs les plus immondes ou à de fausses démocraties.
    Peut-être, mais il y a quand même quelques lueurs qui brillent discrètement dans ces ténèbres.
    Il y a quelques jours, j’ai eu le plaisir de discuter tout un après-midi avec un ami qui m’a expliqué rapidement la structure du groupe dont il fait partie.
    Ils se réunissent en loge et discutent , approfondissent des idées humanistes suivant des règles assez stricte, en ce sens que chacun a droit à la parole, à développer ses opinions sans être interrompus, dans un esprit de grande tolérance.
    A la fin de la séance, une synthèse est proposée sans qu’elle se transforme en dogme.
    Chacun peut donc rester maître de ses opinions mais a pris connaissance des opinions d’autrui et s‘est, de cette manière, beaucoup enrichi.
    Vous avez compris que mon ami est Franc-maçon.
    Mais ne croyez pas que la Franc-maçonnerie soit le seul lieu de rencontre pour ce genre de discussion./
    Il existe quantité d’ateliers du même genre, des associations qui se penchent sur les diverses formes de pensée humaine, les sciences, les arts, la littérature, la politique, la philosophie et beaucoup d’autres sujets.
    La qualité principale de ces ateliers est leur discrétion, aucune ostentation en général, des gens de bonne compagnie qui approfondissent les idées, qui les développent, qui les cultivent, leurs permettent d’évoluer comme une culture dans une boite de Petri.
    C’est grâce a eux que nous savons nous maintenir au dessus de la condition animale, que nous savons faire progresser la pensée au delà des réalités journalières.

Conclusion

    Pour revenir à mes amis voyageurs: Heureux qui comme Ulysse ..
    Quant à mes autres amis, ceux dont je viens de parler, heureux soient-ils eux aussi et encore plus que les autres, ils sont les témoins, ils observent, ils étudient les diverses phases de notre pensée, dans la plus grande discrétion, ils sont les jardiniers de ce qui fait que nous soyons humains, ils se réunissent dans un esprit humaniste et de grande tolérance, ils restent discrets et évitent le suicide orgueilleux d’Icare en évitant de briller auprès du soleil au risque de se brûler les ailes.


                                                                                                 E.A.Christiane
                       
                                                                                          Anderlecht, le 16.03.2011 

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