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25 septembre 2006 1 25 /09 /septembre /2006 07:53

 

 

Quelle tristesse ...

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                                                             Mené

                                                             Teqel

                                                              Oupharsin

                                                                         (Daniel 5.1.25)

 

Quelle tristesse de voir ce beau pays, que nous avons connu, ce grand pays riche et généreux implosé par les forces intérieures, déchiré, partagé, écartelé par ses voisins.

Ceux qui, Congolais ou expatriés, ont contribué à quelque échelon que ce soit, à sa construction, à sa consolidation, à son organisation, à son expansion, à ses espoirs, bref, tous ceux qui l’ont aimé, ne peuvent se résoudre à accepter un tel échec, un tel désastre.

Les belles provinces agricoles, la province orientale et les deux Kivu sont en dissidence et s’appuient sur l’Uganda et le Ruanda.

Plus à l’ouest, l’Ubangi est sous l’autorité du commandant Jean-Pierre, fils d’un homme d’affaires de Kinshasa, d’origine Gbaka, l’ethnie amie de celle de Mobutu; les affinités ethniques ramèneront presque nécessairement les limites de la zone d’influence de la République Centrafricaine des rives de l’Ubangi et de l’Uélé, aux rives du fleuve Congo.

Le Shaba, notre Katanga, aux richesses minières encore bien réelles, livré en gage aux alliés zimbabwéens et autres.

Le Kasaï et ses diamants, qui pourrait être le dernier bastion de l’actuel régime, mais qui intéresse les Angolais, gouvernementaux ou opposants.

Quelle tentation aussi pour les BaKongo d’essayer de reconstituer l’ancien Royaume de Congo, avec sa large ouverture sur l’océan, ses ports en eau profonde de Pointe-noire à Luanda, ses richesses pétrolières, son énorme puissance hydroélectrique et ses richesses agricoles sur des terres qui s’étendent jusque Kikwit.

Mais aussi que de problèmes : des tendances indépendantistes à Cabinda; une rébellion qui isole la capitale du Congo-Brazzaville; un voisin puissant, l’Angola; une mégapole, Kinshasa, pluriethnique, véritable abcès de fixation de tous les problèmes de la région et virtuellement ingérable; deux langues (eux aussi) le portugais et le français, qui pourraient être supplantées par le kikongo, mais qui lui, est une langue locale; bref encore un éventuel très long chemin à parcourir.

Qui voudrait du reste : cette énorme région, à l’intérieur de la courbe du fleuve, au nord du Kasaï et à l’ouest de la Lomami; Mbandaka pourrait trouver preneur, mais des agglomérations comme Boende, Ikela, Monkoto, Basankusu, Djolu, Yahuma, isolées dans une terra qui redevient petit à petit incognita.

Qui en voudrait ?

Que reste-t-il de l’infrastructure administrative, routière, médicale, agricole, commerciale de ce pays?

Que reste-t-il de la Pax Belgica et même de la Pax Mobutu ?

Les populations des villes sont pressurées par tout ce qui a grade et doivent payer tribut chaque fois qu’elles s’aventurent sur la voie publique afin que les fonctionnaires, mal payés ou non payés, puissent eux aussi faire vivre leur famille.

Dans les villages, où comme le disait le Président Kabila, beaucoup de villageois n’ont pour tout bien qu’une houe et ne voient plus passer de véhicule parce qu’il n’y a plus de route; ces villages vivent repliés sur eux-mêmes comme il y a cent vingt ans lorsque Stanley les révélait au monde.

Tippou-Tip, Mirambo, Kabongé, Roumaliza et leurs bandes de négriers ont disparu, mais sont remplacés par des groupes armés, braconniers, soldats déserteurs ou perdus, miliciens de tous poils, qui, lorsqu’ils font une apparition dans ces paisibles villages, se servent, sous la menace de leur kalachnikov, sans beaucoup de vergogne sur les maigres biens des paysans déjà bien dépourvus.

Ce n’est cependant pas la fin, un pays ne peut disparaître, une page se tourne, un nouveau chapitre va s’écrire, mais qui aura l’envie, la force, les capacités, l’honnêteté, l’opportunité, la volonté politique surtout, de redresser la barre, de pacifier, de réunifier et de réorganiser le pays ?

Le festin de Balthazar est terminé, les convives sont repus pour aujourd’hui, beaucoup d’entre eux se sont éclipsés par la porte de service emportant quelques trésors du temple.

Les autres se réveillent très péniblement d’une énorme gueule de bois.

Quant au peuple, il est resté spectateur, aux fenêtres brillamment éclairées, regardant le Prince et ses amis se gaver des richesses du pays, de leurs richesses.

On leur a donné, pour les calmer, des jeux: une coupe du monde de football, un match de boxe chargé de symboles, des flonflons militaires, des feux d’artifice, des discours et des promesses.

Du pain aussi ou plutôt de temps à autre un os à ronger, une zaïrianisation, des fêtes à la Nsélé, mais du grand festin, ils n’ont reçu que quelques miettes tombées de la table.

Au lendemain de l’Exposition universelle de 1958, les leaders politiques congolais espéraient pouvoir être les Moïse appelés à conduire le peuple congolais vers un pays où coulerait le lait et le miel.

Quatre décennies, quarante ans plus tard, après une longue errance, leurs enfants, tous les Josué du Congo, sont, hélas !, encore très loin de la terre promise.

Quelle tristesse.

E.A. Christiane

 

 

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